Rémi Chéno, L’Esprit-Saint et l’Église. Institutionnalité et pneumatologie. Vers un dépassement des antagonismes ecclésiologiques, Paris : éditions du Cerf, Cogitatio fidei no 275, 2010, 344 pages.
La grâce divine peut certes se donner au croyant individuel comme un don illuminateur, libérateur ou réconciliateur. Mais, en particulier à travers les actions sacramentelles de la liturgie, elle vient habiter réellement notre histoire et y inscrit comme des « traces instituantes du Royaume ». Comment pourrait-on parler des chemins de la grâce dans notre monde et dans notre histoire sinon comme les chemins chaotiques d’une humanité fragile et pécheresse ? « Traces », et donc des réalités fragiles et fugitives, certes, mais traces pourtant « instituantes », c’est-à-dire portant un fruit, produisant une œuvre. L’approche catholique classique présente le Christ comme le fondateur de l’Église et des institutions qui la structurent ; il est ainsi constitué en principe d’autorité et en source du droit ecclésial, de lui dérivent l’autorité hiérarchique des ministères et l’organisation juridique qui régit son corps. Selon l’approche pneumatologique, ou bien l’Esprit est dévalué comme simple agent envoyé par le Christ au service de l’animation de son Église à travers ses membres et son action gracieuse dans les cœurs, ou bien on met tellement en avant la liberté charismatique qu’elle se retrouve en conflit avec les institutions ecclésiales. Rémi Chéno retrace l’histoire de ces antagonismes, d’origine protestante, entre institution et communion, et les approches de type sociologique qui en ont été tentées. Faisant droit à l’histoire de la théorie institutionnaliste, en particulier chez le juriste Maurice Hauriou, fondateur de l’école institutionnaliste française, ainsi qu’aux recherches d’un fondement théologique du droit institutionnel, en particulier chez le luthérien Hans Dombois, qui dessinent le cadre de sa réflexion, il élabore une théologie de l’institution placée sous le signe eschatologique du Royaume où l’agir gracieux de l’Esprit apparaît comme un processus instituant qui donne au Christ son Corps total, l’Église. Dans cette thèse, résolument novatrice et courageuse, Rémi Chéno cherche à dépasser les fausses dialectiques qui ont envahi le discours ecclésiologique selon le paradigme de l’antagonisme fondation/institution par une théologie de l’institution articulée à une pneumatologie.
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